La chimie au service du patient
La chimie est au cœur de la vie~; elle est le fondement du fonctionnement du vivant. De tout temps, l’Homme a eu recours à la chimie, à la fois pour accéder à la connaissance et pour réaliser des progrès médicaux. Car, au-delà d’une aide à la compréhension des mécanismes de la vie, la chimie permet aussi de concevoir des outils pour prévenir, diagnostiquer et traiter les pathologies. Tel est le formidable enseignement de cet ouvrage collectif dont les auteurs, experts biologistes, physiciens et chimistes, nous rendent compte de la place charnière de la chimie dans les sciences médicales.
Les atouts de la chimie sont mis à profit pour élucider la structure de molécules biologiques, pour comprendre les fonctions et les mécanismes de régulation des systèmes biologiques, et les dérèglements qui conduisent aux pathologies. Quel biologiste n’a pas eu recours à la chimie pour étudier les organes, les tissus, les cellules, les gènes, les systèmes biologiques et ses pathologies~? Quelle discipline médicale ne fait pas appel aux outils et aux concepts de la chimie pour diagnostiquer et traiter les pathologies~?
L’apport de la chimie permet de plus en plus de mettre des outils et des technologies de pointe à la disposition des médecins et des patients. Elle permet d’élaborer de nouvelles molécules -~parfois inexistantes à l’état naturel~- et d’optimiser le diagnostic et les soins. Imagerie médicale, rayonnements ionisants, polymères de synthèse, synthèse chimique de molécules thérapeutiques et de matériaux moléculaires, nanotechnologies pour la vectorisation de médicaments… Les exemples ne manquent pas qui témoignent des enjeux considérables de l’apport de la chimie aux sciences médicales. Et toutes les maladies sont concernées, des plus fréquentes -~maladies cardiovasculaires, cancers, maladies neurodégénératives, diabète, maladies infectieuses~- aux plus rares.
L’Inserm, au cœur du dispositif de la recherche médicale en France, favorise depuis toujours ses interactions avec les chimistes. Que ce soit dans le domaine de la recherche fondamentale ou en recherche clinique et thérapeutique, nombreuses sont les études faisant appel à la chimie. Des efforts sont réalisés actuellement pour promouvoir l’interface chimie-biologie. En 2003, nous avons mis en place à l’Inserm une structure d’évaluation et d’animation de la recherche dédiée spécifiquement à cet objectif. La collaboration entre nos biologistes et les chimistes du département des sciences chimiques du CNRS, en particulier, se renforce activement. Ainsi, dans le cadre de l’action thématique concertée «Médicaments et vectorisation» de notre institut, nous répertorions l’ensemble des cibles biologiques étudiées dans nos laboratoires en vue de créer une «ciblothèque». L’objectif est de favoriser les rapprochements entre les «détenteurs» de ces systèmes biologiques et les chimistes du CNRS qui disposent de chimiothèques. Parmi les autres initiatives récentes de l’Inserm, citons le lancement d’un appel d’offre pour la mise en oeuvre de techniques de criblage rapide de molécules. En parallèle, l’Institut des maladies rares, auquel l’Inserm est associé, propose aux scientifiques une aide au développement de stratégies de criblage~; il favorise leur accès aux banques de molécules et aux plates-formes de criblage existant dans notre pays.
Autant d’initiatives qui devraient se traduire par le développement de nouvelles interactions fructueuses entre chimistes et biologistes, et par l’abolition définitive de la frontière qui sépare les deux communautés. Deux conditions essentielles au développement de la connaissance et à l’essor de l’innovation médicale.
Christian Bréchot,
directeur général de l’INSERM
Ce texte a été rédigé avec la collaboration de Brigitte Amiranoff, directeur de recherche à l’INSERM.
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