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Les avatars de la chimie physique

Article paru dans l'Actualité Chimique N°299 - juillet 2006
Rédigé par Rigny Paul

A la suite du vote du 30~mars dernier, la Société Française de Chimie envisage de changer son intitulé en Société Chimique de France. Elle reviendrait ainsi au nom de l’une des deux sociétés mères, disparues en 1984 pour donner naissance à la Société Française de Chimie, la seconde étant la Société de Chimie Physique (SCP). C’est l’occasion d’une réflexion sur l’évolution de la chimie physique en tant que champ scientifique dont l’animation a été transférée en 1984 à une division de la SFC, la division de Chimie physique (DCP) –~associée par convention en 1999 à la Société Française de Physique.

Marquée par tant de personnalités comme Walther Nernst, Jean Perrin, Peter Debye, George Porter, Pierre-Gilles de Gennes, cette discipline est pour ses adeptes le creuset d’une créativité particulièrement originale. Pour d’autres, serait «chimie physique» tout ce qui fait intervenir à la fois physique et chimie (c’est-à-dire chimie du solide, sciences des matériaux, catalyse, génie des procédés, polymères, biologie structurale… bref, presque tout), limitant considérablement la spécificité de la discipline. En 2000, la DCP a publié une analyse argumentée du champ scientifique «chimie physique» tel qu’elle l’entend Voir la rubrique «réflexions» sur le site de la DCP~: http://sfp.in2p3.fr/chimie.. On y voit bien le rayonnement de la discipline, moins bien une délimitation du champ scientifique correspondant. Les titres des excellents journaux européens qui représentent cette discipline depuis la fin des années~90 n’éclairent pas non plus cette question~; on n’y reconnaît pas l’assurance des fondateurs du Journal de Chimie Physique, fondé en 1908 et disparu en 1999. Si ces journaux montrent bien l’intérêt de la science à l’interface, leurs titres, ChemPhysChem et Physical Chemistry Chemical Physics (PCCP), qui reprennent «chimie physique» et «physicochimie» dans leurs traductions anglaises ne clarifient guère la définition du domaine concerné.

Cette question va au-delà de la simple sémantique. Les chercheurs s’attachent à l’identité de leur discipline pour faire connaître et défendre leur travail~; ils savent que ce n’est pas seulement un jeu intellectuel, mais entraîne des conséquences réelles sur l’affectation des moyens et sur les vocations. S’il n’est pas récent (il était déjà vif au CNRS dans les années 1970), le débat sur l’identité de la chimie physique ne s’est jamais conclu~: faut-il associer «chimie physique» à cette attitude scientifique alliant le concret et l’imaginatif, la rigueur et le modèle, le déductif et l’inductif, dans un domaine d’interface qui s’est montré si fécond au XXe~siècle –~véritablement davantage «attitude» ou «méthode» que sujet d’étude~? Ou faut-il considérer que le mélange entre physique et chimie s’est tellement répandu que «chimie physique» est devenu un concept non opérant, noyé dans la multitude des interfaces actives aujourd’hui~?

Si le débat vous concerne, envoyez-nous vos réflexions sur ces points, par courrier ou par courrier électronique Courriel : redaction@lactualitechimique.org, objet~: «Chimie physique». avant la fin du mois de septembre. Nous synthétiserons vos réponses en liaison avec la DCP et vous refléterons leurs contenus.

Dans ce numéro, L’Actualité Chimique revient sur l’hommage à Pierre Potier. Notre collègue Gilbert Schorsch a assisté avec son regard personnel à la cérémonie officielle organisée le 12~mai 2006 à la Maison de la Chimie et nous livre les réflexions qu’elle lui a inspirées. Au-delà des discours émus et forcément un peu solennels des cérémonies, il nous a paru important de revenir sur l’activité scientifique de Pierre Potier qui permet de mieux comprendre les points où s’est exercé son talent de chercheur et la démarche qui l’a mené à la découverte des médicaments maintenant si célèbres~; l’article de Jean-Claude Bernier est particulièrement lumineux sur le sujet.

Paul Rigny
Rédacteur en chef

Couverture

Irène, l’un des modèles de la campagne Dove 2005 «Pour toutes les beautés». ©~Dove.

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