Pollution pétrolière, analyse, chimie verte
La pollution accidentelle ne cesse d’être à l’ordre du jour et, au-delà de la description de catastrophes, les articles de la grande presse sont orientés vers la recherche des responsabilités.
Nos objectifs sont différents par nature, et ce que nous avons voulu savoir dans le cadre de la catastrophe de l’Erika est simplement quels sont les moyens chimiques, physico-chimiques et mécaniques que l’on peut employer pour lutter contre une importante pollution par les hydrocarbures.
Les informations recueillies dans l’article de J.-C. Gérard conduisent à se poser certaines questions sur les aspects analytiques. Si personne ne remet en cause la présence de composés aromatiques condensés dans un fioul n° 2, on observe des divergences en ce qui concerne les résultats des dosages. Pourquoi ? S’agit-il de la méthode de prise d’échantillons et n’y a-t-il pas une méthode normalisée pour l’échantillonnage ? S’agit-il de la méthode d’analyse et de son degré d’incertitude ?…
Nous ferons, dans un numéro prochain, une présentation des techniques de caractérisation des hydrocarbures polycycliques aromatiques. Ce point semble important car la discussion de certains résultats concernant la pollution par le contenu de l’Erika était accompagnée d’une suspicion en ce qui concerne la réelle nature de son chargement. L’expertise technique qui dépend très souvent de l’analyse doit être rigoureuse, mais l’interprétation des résultats d’une méthode analytique, aussi fiable soit-elle, repose sur la qualité et la représentativité de l’échantillon.
Une seconde réflexion m’est venue à la lecture des moyens employés pour le nettoyage des zones souillées. Cette réflexion m’a été inspirée par l’utilisation d’ester de méthyle de l’acide oléique (produit biodégradable) dans les formulations de détergent.
Je me souviens des années folles qui ont suivi le premier choc pétrolier dans les années 70. L’augmentation brutale du prix du baril (de 2,3 US $ en 1970 à 40 US $ en 1973, en dollar constant base 2000), dans une économie de gaspillage non préparée aux restrictions énergétiques, a fait émerger, à côté de mesures sérieuses, des idées d’une touchante naïveté pour substituer à la pétrochimie une chimie issue des ressources naturelles renouvelables. Il faut se souvenir que la pétrochimie n’utilise que 7 % de la consommation des hydrocarbures fossiles (énergie de transformation comprise) et cela pour fabriquer en gros tonnages des molécules extrêmement simples.
La nature nous offre des molécules d’une merveilleuse complexité et l’idée d’utiliser la culture à des applications non alimentaires est sans doute intéressante, à la condition d’utiliser les propriétés spécifiques que peuvent offrir des « agromolécules ». La recherche pharmaceutique ne nous a-t-elle pas montré le chemin ?
Bernard Sillion
Rédacteur en chef
Couverture : Le naufrage du tanker Erika (voir article p. 35). Photo Marine nationale
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