Les nanoparticules envahissent notre quotidien, dans la recherche comme dans l’industrie. Leur fort rapport surface/volume leur confère des propriétés inhabituelles, pilotées par la réactivité de leur surface. Leur petite taille leur confère aussi une grande mobilité. Ce sont ces deux aspects, réactivité de surface et mobilité de nanoparticules individuelles, que vise à étudier l’instrument développé conjointement par l’ITODYS (Université Paris Diderot) et le Laboratoire de Neurophotonique (Université Paris Descartes).

L’instrument propose la lecture d’évènements discrets chimiques de nanodomaines individuels en combinant (i) une localisation optique 3D, sensible et précise de nanoobjets, et (ii) une caractérisation/actuation électrochimique précise d’évènements physico-chimiques individuels. L’objectif est de fournir une description complète des réactions/interactions de nanodomaines ou nanoparticules individuels avec une interface.

Un microscope holographique est utilisé (voir figure 1) : le faisceau d’un laser monomode (l = 532 nm) est séparé en deux voies afin de produire un hologramme sur un capteur CCD (images 512 x 512, 1 pixel = 0,08 m, cadence = 40 Hz). La figure d’interférence obtenue porte ainsi une information sur l’amplitude et la phase de la lumière diffusée par les particules. La reconstruction numérique de la propagation de l’onde permet d’obtenir une image 3D de l’échantillon.

L’échantillon se compose d’une cellule microfluidique électrochimique transparente, munie d’une électrode plane transparente (ITO) ou semi-transparente (Au) et de canaux permettant d’introduire une solution colloïdale (nanoparticules de 5 à 50 nm de rayon). L’image 3D de l’échantillon reconstruite à partir d’un seul hologramme contient autant de taches qu’il y a de particules visibles (figure 2).

Un algorithme permet de localiser en 3D le barycentre de dizaines de taches de diffraction dans le volume optique reconstruit avec une précision de localisation de 3 x 3 x 10 nm3 (figure 3). Le calcul massivement parallélisé sur carte graphique est effectué en quelques dizaines de millisecondes.

Ce dispositif a mis en évidence par exemple les processus de transport et de réaction associés à la sollicitation électrochimique de nanoparticules d’argent individuelles. Sur les clichés de la figure 2, des nanoparticules d’argent s’adsorbent sur la surface d’électrode avant de disparaître une à une (dissolution par oxydation, Ag → Ag+ + e-). La dynamique de dissolution de nanoparticules individuelles est suivie optiquement. L’utilisation de microélectrodes microfabriquées permet d’obtenir un lien univoque entre observations optique et électrochimique à l’échelle de nanoparticules individuelles.

Les résultats obtenus sont tout à fait prometteurs quant à l’étendue des champs d’application de cette instrumentation pour la chimie, l’électrochimie, la biochimie ou biophysique de nanoobjets individuels.

Suivi nanométrique de nanoparticules réactives. 1. Schéma de fonctionnement du microscope holographique. 2. Zoom sur la cellule microfluidique électrochimique utilisée pour le suivi de l’adsorption/dissolution par oxydation de nanoparticules d’argent individuelles. 3. Exemple de volume optique reconstruit (trois nanoparticules dans 5 x 5 x 5 m3). Images 1 et 3 adaptées avec permission de Batchelor C. et al., Chem. Phys. Lett., 2014, 597, p. 20, © 2014 Elsevier, et image 2 adaptée avec permission de Patel A.N. et al., Nano Lett., 2015, 15, p. 6454, © 2015 American Chemical Society.