Chimie et environnement
Objectifs et développements récents
Rédigé par Aaron Jean-Jacques
Le groupe thématique Environnement, rattaché à la division Chimie analytique de la Société Française de Chimie, a été créé officiellement le 29 juin 2001. Il constitue le 12e groupe scientifique de la SFC.
Bien que la chimie de l’environnement soit devenue un domaine scientifique important et très actif depuis plusieurs années sur le plan international et qu’elle ait fait l’objet de nombreux ouvrages fondamentaux et de colloques internationaux, elle n’était pas reconnue jusqu’à présent au niveau national.
Dès sa création, le groupe Environnement a proposé une série d’actions pour développer ce thème :
- mise en place d’une page d’information sur le site Internet de la SFC (liste des membres et leurs coordonnées, forum de discussion, liens vers les laboratoires et les autres sites impliqués en chimie de l’environnement, lexique des principaux termes et épistémologie de la chimie de l’environnement) ;
- organisation de colloques et participation à des congrès sur le thème de la chimie de l’environnement ;
- établissement de plates-formes de réflexion sur les besoins en chimie de l’environnement, avec les thèmes suivants : la chimie, un outil pour les sciences de l’environnement (caractérisation, devenir et risques écotoxicologiques des substances chimiques) ; chimie analytique des ultra-traces ; normes environnementales au niveau français ; chimie de l’environnement dans les filières de l’enseignement ; effets de la contamination chimique ; références françaises en chimie de l’environnement ;
- publication d’un numéro thématique de L’Actualité Chimique sur le thème : chimie et environnement.
Les 15 et 16 novembre 2002, les Journées d’études SFC de l’environnement 2002 : aspects analytiques et électrochimiques ont été organisées au Centre National des Arts et Métiers à Paris, en collaboration entre le groupe Environnement (Dr Olivier Donard) et le groupe Électrochimie, le professeur Jean-François Fauvarque en étant le coordinateur. Ces Journées ont réuni plus de 130 participants, dont certains venus de l’étranger (Belgique, Espagne, Italie, Maroc, Suisse). Elles ont permis de présenter plusieurs sujets importants liés à la chimie de l’environnement comme les contaminants organiques, le problème du traitement des effluents, la dépollution des sols, l’évaluation du risque des substances chimiques dans l’environnement, le rôle de la spéciation dans les transferts de contaminants, la spéciation des métaux et métalloïdes, etc.
Par ailleurs, le Comité de rédaction de L’Actualité Chimique, réuni le 16 décembre 2003 a donné son avis favorable à la publication en 2004 d’un numéro thématique : Chimie et environnement .
Les objectifs de ce numéro sont essentiellement de montrer l’importance du rôle des sciences chimiques dans l’environnement et leur articulation avec d’autres domaines (physique atmosphérique, hydrogéologie, biologie, toxicologie…), de présenter les principales méthodes permettant de détecter, évaluer et suivre les polluants chimiques présents dans l’environnement et leurs transformations, de décrire les interactions polluants-environnement dans les différents compartiments et leurs effets écotoxicologiques, et enfin d’examiner les divers outils chimiques susceptibles de décontaminer l’environnement. En effet, il convient d’insister sur le fait que la chimie n’a pas que des effets négatifs sur l’environnement, mais qu’elle permet également d’en améliorer la qualité et de contribuer à mieux connaître par des outils adéquats les processus physico-chimiques se produisant dans l’environnement.
Compte tenu de la diversité des effets de la chimie dans l’environnement qui, de plus, interagit souvent avec d’autres sciences, ainsi que de la grande complexité des réactions chimiques se produisant dans les différents compartiments de l’environnement (air, eaux, sols), le choix des domaines les plus représentatifs et des articles correspondants s’est avéré délicat.
Le premier thème abordé concerne l’analyse chimique appliquée à l’environnement. Il est en effet très important de pouvoir identifier les polluants chimiques présents dans l’environnement et de les quantifier au niveau des traces et des ultra-traces à l’aide de méthodes d’analyse fiables, sensibles et reproductibles. L’analyse en chimie environnementale comprend plusieurs étapes, à savoir le prélèvement, l’extraction, la séparation et la détection ; les méthodes correspondantes sont présentées brièvement, avec plusieurs exemples relatifs à des polluants typiques dans les eaux et les sédiments (Sandrine Irace-Guigand et Jean-Jacques Aaron). Une double approche analytique récente, visant à réaliser l’extraction sélective de traces de polluants organiques à l’aide d’immunoadsorbants et de polymères à empreintes moléculaires, est présentée dans l’article de Valérie Pichon, Florence Chapuis et Marie-Claire Hennion. Un cas particulier d’application de la chimie analytique aux métaux traces des sols est examiné par Alain Bermond.
Un deuxième sujet d’importance est l’étude du devenir des polluants chimiques et de leurs transformations et interactions dans les différents compartiments de l’environnement. Ainsi, le cycle de vie des polluants est étudié à partir du cas des pesticides de la famille des phénylurées (Michèle Bolte). Le rôle essentiel de l’atmosphère comme vecteur des micropolluants organiques vers les écosystèmes est décrit par Marc Chevreuil. La dispersion des produits pharmaceutiques et leurs transformations dans les eaux et les sols constituent des phénomènes complexes, dont les conséquences considérables pour la santé humaine et l’écosystème commencent à être appréhendées et font actuellement l’objet de nombreuses recherches (Yves Levi).
Le troisième thème retenu concerne les méthodes physico-chimiques de dépollution et de remédiation, qui permettent de détruire partiellement ou complètement les substances chimiques contaminant l’environnement. Les méthodes d’oxydation avancée, qui font appel à des processus catalytiques, électrochimiques et/ou photochimiques, représentent actuellement les principaux axes de recherche pour la dépollution des substances organiques dans les eaux (Mehmet A. Oturan, Nihal Oturan et Jean-Jacques Aaron). Une application typique de l’une de ces méthodes est détaillée dans le cas de la décontamination des eaux par les colorants synthétiques : il est montré que la méthode électro-Fenton aboutit à des résultats prometteurs (Élodie Guivarch et Mehmet A. Oturan). Finalement, Philippe Pichat démontre comment il est possible d’aller jusqu’au bout de la dépollution de l’environnement en effectuant le traitement ultime des déchets.
Enfin, il nous est apparu essentiel de montrer la manière dont la chimie de l’environnement, et plus généralement les sciences de l’environnement, sont enseignées à l’heure actuelle en France. Ainsi, les principes fondamentaux de l’éducation et de la formation souhaitables en chimie de l’environnement pour sensibiliser l’opinion au développement durable sont exposés (Philippe Garrigues). Les filières universitaires et d’écoles d’ingénieurs relatives aux sciences de l’environnement en France sont traitées dans le cadre de la réforme LMD (Alain Bermond, Gilberte Chambaud et Jean-Jacques Aaron).
Ce numéro thématique fait donc le point sur l’état actuel des recherches et des résultats obtenus pour plusieurs aspects essentiels de la chimie de l’environnement. La 9th FECS Conference on chemistry and the environment et le 2nd SFC Meeting on environmental chemistry qui auront lieu à Bordeaux du 29 août au 1er septembre 2004 seront l’occasion de présenter les progrès récents de ces travaux.
Jean-Jacques Aaron
Coordinateur du numéro