Le talc est connu depuis l’antiquité : son nom vient du persan « Talq » emprunté à l’arabe. C’est Georgius Arcola qui décrit le minéral en 1546, mais c’est Bernard Palissy qui introduisit cette appellation en 1560.
Le système cristallin du talc est constitué d’un un empilement de feuillets composés de couches d’octaèdres OH-Mg-O prises en sandwich entre deux couches de tétraèdres Si-O. Ces feuillets en couches externes ne montrent pas de groupes OH ou de cations, ce qui explique le caractère hydrophobe et inerte du talc et la facilité de son clivage. On distingue deux structures cristallines 1A et 2M, la première triclinique et la seconde monoclinique avec toutes deux la construction en feuillets alternés.
La taille d’une lamelle de talc qui représente plusieurs millions de feuillets élémentaires peut varier de 1 µm à plus de 100 µm. Elles distinguent le talc lamellaire (grandes tailles) du talc microcristallin (petites tailles). Les feuillets élémentaires sont empilés les uns sur les autres comme dans un millefeuille et reliés entre eux par des forces de van der Waals relativement faibles, ce qui fait que les lamelles peuvent glisser les unes sur les autres, ce qui donne au talc sa douceur caractéristique.
Le talc est insoluble dans l’eau, dans les acides et bases faibles. Au-dessus de 900 °C, il perd les groupes hydroxyle et au-dessus de 1 050 °C, il recristallise sous forme d’enstatite. Le point de fusion est au-dessus de 1 500 °C. Rappelons qu’il correspond au niveau 1 de l’échelle de dureté de Mohs.
Les minerais peuvent être classés en deux types de gisements :
– le talc chlorite, très riche en talc, et accompagné de chlorite, un silicate de magnésium (cf. Magnésium) et d’aluminium hydraté,
– le talc carbonate, composé de talc accompagné de magnésite ou de dolomie (carbonate mixte de magnésium et de calcium).
La plus grande carrière de talc au monde est située en France dans l’Ariège à Trimouns près de Luzenac. Ce gisement s’est formé il y a près de 300 millions d’années dans une faille coincée entre une veine de microschistes et une veine de dolomie. Il a fallu le début du XIXe siècle pour qu’un ramassage artisanal de la roche blanche, broyée dans des moulins à farine, se commercialise chez les droguistes et apothicaires de Toulouse.
C’est le développement de la papeterie en Ariège et l’arrivée du chemin de fer en 1888 qui lancent dans les années 1900 la Compagnie du Talc de Luzenac. Située à 1 800m d’altitude, la carrière à ciel ouvert est exploitée d’avril à novembre, mais l’usine de Luzenac tourne toute l’année grâce aux stocks accumulés dans la saison. La production est de l’ordre de 450 000 t/an. Le Canada en produit aussi 80 000 t/an. La consommation mondiale est de l’ordre de 4,5 Mt.
Les utilisations du talc sont variées :
– les céramiques : il entre dans la composition des carrelages, sanitaires et céramiques techniques. En particulier, les talcs microcristallins sont traités à haute température pour en faire des isolants électriques en stéatite,
– les peintures : le talc améliore le pouvoir couvrant et la résistance aux craquelures. Il entre aussi dans la composition des peintures anticorrosion,
– les papiers : le talc est utilisé comme charge dans les papiers couchés et non couchés, améliorant l’imprimabilité et réduisant les frottements de surface. Il « nettoie » la chaîne de fabrication en absorbant les résines résiduelles de la pâte à papier,
– les soins corporels : c’est sans doute l’application la plus populaire. Qui n’a pas eu, bébé, les fesses talquées ? Comme poudre corporelle, il est présent dans de nombreux cosmétiques, il assure le satin des fards, la transparence des fonds de teint. C’est aussi un excipient en pharmacie comme agent glissant et lubrifiant.
– les plastiques : le talc est employé comme charge dans les polypropylènes (cf. Polypropylène) assurant une rigidité accrue et une bonne stabilité dimensionnelle des pièces automobiles. C’est aussi un agent anti-bloquant dans le polyéthylène basse densité (cf. Polyéthylène).
– le caoutchouc : le talc réduit la viscosité des mélanges de caoutchouc (cf. Caoutchouc), améliore les qualités d’extrusion et renforce la protection aux UV. Il est aussi utilisé pour renforcer l’isolation dans les gaines de câbles électriques (cf. Polychlorure de vinyle).
– dans l’alimentation, c’est un agent anti-collant efficace dans un grand nombre de produits alimentaires : le chewing-gum, les bonbons, les salaisons.
C’est aussi un agent de sédimentation et de précipitation pour le traitement des eaux usées.
L’affaire du talc Morhange
Au printemps 1972 les autorités sanitaires sont alertées par un nombre anormal de décès de nourrissons par brûlures, fièvres, œdèmes, paraplégie et encéphalites, notamment en Champagne-Ardenne. Les chercheurs de l’INSERM et un épidémiologiste constatent sur le terrain un élément commun à toutes ses manifestations : l’utilisation du talc Morhange.
Les tests montrent que ce talc contient 6 % d’hexachlorophène, un puissant bactéricide fabriqué par la société Givaudan depuis 1939 dont la toxicité avait été peu étudiée en Europe mais qui venait d’être interdit aux États-Unis par la FDA. Fin août 1972, l’alerte est lancée par le Ministère de la santé sur tous les flacons de talc Morhange : sur les 2 800 boites contaminées lancées sur le marché, on n’en retrouvera que quelques centaines.
Quatre années d’enquêtes aboutissent au scénario catastrophe de l’erreur de manipulation dans le conditionnement : 38 kg d’hexachlorophène ont été mélangés par inadvertance à 600 kg de talc pur et ont été réintroduits dans la chaîne de fabrication. Cet accident aura provoqué la mort de 36 bébés, 224 intoxications dont 8 avec une infirmité totale. Le procès ouvert en 1979 voit en 1980 la condamnation des cinq principaux inculpés, défendus par Me Badinter, à des peines de prison avec sursis ; ils seront amnistiés en 1981.
Pensée du jour
«Il est curieux de penser que les footballeurs bébé se font talquer leur arrière et quand ils sont grands ils se font tacler par les arrières.»
Sources
– http://fr.wikipedia.org/wiki/Talc
– http://en.wikipedia.org/wiki/Talc
– http://www.ariege.com/geologie/talc/
– http://fr.wikipedia.org/wiki/Luzenac
– http://fr.wikipedia.org/wiki/Affaire_du_talc_Morhange
– http://fr.wikipedia.org/wiki/Hexachlorophène
Pour en savoir plus
– Nickel
– Aluminium
– Magnésium
– Polypropylène
– Polyéthylène
– Caoutchouc
– Polychlorure de vinyle