L’acide chlorhydrique, encore dénommé chlorure d’hydrogène sous sa forme anhydre, de formule HCl et de masse moléculaire 36,5, est en solution dans l’eau un acide fort, dissocié en ions H3O+ et Cl–. Il fut découvert par l’alchimiste Jabir lbn Hayyan aux environs des années 800, par la réaction de l’acide sulfurique (cf. Acide sulfurique) sur le chlorure de sodium (cf. Chlorure de sodium) :
2 NaCl + H2SO4 ———> Na2SO4 + HCl
d’où son nom « muriatique », appartenant au sel de la mer ou de la mer, et donc aussi un autre nom commun « esprit de sel » courant dans les anciennes drogueries.
Les alchimistes trouvèrent également que le mélange de l’acide chlorhydrique et de l’acide nitrique (cf. Acide nitrique) dissolvait quantités de roches et de métaux : ils avaient découvert l’eau régale, qui servit durant des siècles à la quête de la pierre philosophale.
C’est après 1800 et la révolution industrielle que l’acide chlorhydrique fut produit en quantités appréciables. Une première source fut la fabrication du carbonate de sodium selon le procédé Leblanc. Au XVIIIe siècle le besoin de carbonate de sodium, encore appelé « soude », se faisait sentir pour la fabrication du verre et du savon, obtenu jusque-là par la calcination des plantes et des algues. Avec la déforestation conséquente, il devait être importé notamment du Moyen-Orient. En 1782 l’Académie des sciences offre un prix de 2 400 livres à qui trouvera un moyen d’obtenir le carbonate de sodium à partir du sel de mer. C’est Nicolas Leblanc qui, en 1789, propose l’attaque par l’acide sulfurique ({vide supra), suivie de la calcination du sulfate de sodium en présence de craie et de charbon :
Na2SO4 + CaCO3 + 2C ———> Na2CO3 + CaS + 2CO2
La première réaction produisait le gaz chlorhydrique qui était rejeté dans l’air et la seconde fournissait le carbonate de sodium soluble dans l’eau, récupéré par évaporation, et du sulfure de calcium dont on ne savait que faire. L’Alkali Act (une des premières lois de protection de l’environnement !), pris en 1863, obligea les producteurs à dissoudre le chlorure d’hydrogène dans l’eau et fournit donc de grandes quantités d’acide.
Le procédé Deacon d’oxydation de l’acide chlorhydrique, en produisant du dichlore, Cl2, utilisé pour le blanchiment du textile et du papier, autorisa un premier débouché. Le procédé Claus, décomposant le sulfure de calcium, CaS, en soufre et chaux utilisa le deuxième sous-produit. Au début du XXe siècle, le procédé Solvay remplace le procédé Leblanc et ne fournit plus de l’acide chlorhydrique comme produit secondaire, mais le chlorure de calcium, CaCl2.
La fabrication de l’acide chlorhydrique peut se faire directement dans des chalumeaux, dans une flamme à près de 2 000 °C :
Cl2 + H2 ———> 2 HCl
La combustion demande des gaz très secs et a lieu en présence d’un léger excès de dihydrogène. Une autre possibilité est la réaction à haute température en présence de carbone :
2 Cl2 + 2 H2O + C ———> 4 HCl + CO2
Toutefois, la majeure partie est issue des réactions de chloruration de composés organiques :
2 (C)—H + Cl2 ———> 2 (C)—Cl + HCl
réaction générique de substitution énormément pratiquée en chimie organique industrielle. L’acide produit est généralement réutilisé sur le site industriel même ({marché captif).
Une autre source importante d’acide chlorhydrique est la réaction entre le bisphénol A (cf. Bisphénol A) et le phosgène, COCl2, qui conduit aux polycarbonates.
On utilise l’acide chlorhydrique en solution avec des teneurs en poids comprises entre 10 % (3M) et 38 % (12M), les acides industriels ont des teneurs de l’ordre de 32 ± 2 % (10 M). La production mondiale est de l’ordre de 20 Mt/an. Le marché extérieur ne représente en réalité que 5 Mt/an, le reste étant produit et utilisé en interne sur des sites industriels intégrés.
L’acide chlorhydrique est utilisé notamment pour la fabrication du chlorure de vinyle pour le PVC, le 4,4’MDI pour les polyuréthanes. C’est aussi un acide utilisé pour le décapage du fer et des aciers, car il dissout l’oxyde de fer :
Fe2O3 + Fe + 6 HCl ———> 3 FeCl2 + H2O
Les produits de décapage sont recyclés par oxydation qui régénère l’acide chlorhydrique selon la réaction :
4 FeCl2 + 12 H2O + O2 ———> 8 HCl + 2 Fe2O3
L’acide chlorhydrique est aussi utilisé dans l’industrie pétrolière pour l’exploitation des gisements : on injecte l’acide pour dissoudre une partie des roches et les rendre poreuses afin de faciliter l’extraction du pétrole (gisements de la mer du Nord).
L’acide chlorhydrique est présent dans le suc gastrique de l’estomac pour démarrer la digestion des aliments. Il est secrété par les cellules pariétales des glandes épithéliales. C’est un mécanisme complexe de protection des parois par le dépôt d’une fine couche de mucus sur l’épithélium, accompagné de sécrétion de carbonate de sodium par les mêmes cellules épithéliales. L’excès de sécrétion acide provoque des brûlures d’estomac et des ulcères qui peut être bloqué par des antiacides qui neutralisent cet excès.
L’emploi domestique de l’acide chlorhydrique, même dilué, utilisé par exemple pour le détartrage des lavabos ou cuvettes de WC demande des précautions : protection des mains par des gants de latex et des yeux par le port de lunettes. Il ne faut jamais mélanger l’acide chlorhydrique à l’eau de Javel (cf. Eau de Javel), car il se dégage du dichlore, un gaz irritant, à ne pas respirer.
Pensée du jour
« Son discours acide finit par décaper l’assemblée et décamper l’assistance »
Sources
– http://fr.wikipedia.org/wiki/Acide_chlorhydrique
– www.societechimiquedefrance.fr/extras/Donnees.htm
– http://en.wikipedia.org/wiki/Hydrochloric_acid
Pour en savoir plus
– Acide sulfurique
– Chlorure de sodium
– Acide nitrique
– Bisphénol A
– Eau de Javel